mercredi 9 décembre 2015

P..... 40 ans! - La genèse.

Quarante ans depuis ce jour de juillet 75 où, pour la première fois, je rendais son salut au motard en Quatre Pattes que je croisais avec Ma moto. Officiellement la 125 Yam était un vélomoteur mais j'étais devenu motard! 
Plus que les machines, les rencontres qui y sont liées ont joué un rôle important. Les premières surtout.
Au commencement, donc, il y eut Alain. Une bête curieuse pour l'époque, qui venait au bahut en 850 GT California. Et pour cause. Il cubait 2 ans de plus que la moyenne en seconde. Cette Calif, il la devait à une tombola organisée par Robert Teston, importateur Guzzi jusqu'en 72 et concessionnaire de la marque, dans le cadre d'une concentre marseillaise. Venu en 125 Honda, il était reparti en V-Twin italien. Premières vraies sensations de la route! J'ai en mémoire une nuit, alors que nous roulions vers La Couronne, les gerbes d'étincelles de la grosse Guzz' sur l'angle et des aiguilles des instruments Veglia qui m'hypnotisaient par dessus son épaule, de leur agitation parkinsonnienne... Alain, d'une famille d'intellectuels, rêvait de grands espaces. Alors que le Bac s'annonçait pour moi, il larguait les amarres pour le Québec, me laissant ses bottes, son blouson et Patrick.
Patrick. Grande gueule, grand cœur. Ecorché de la vie. Je l'ai connu avec des béquilles, en convalescence chez Alain. Patrick, c'est le prototype même du gars que je n'aurai pas rencontré sans la moto. Véritable vecteur de lien social. Un mec bourré qui te percute à un feu rouge à plus de 100, ça laisse de méchantes traces. Opérations multiples, rééducation, convalescence, il n'attendait qu'une chose: repartir en bécane. Les dommages et intérêts perçus suite au procès permirent au "Fléau Ravissant" d'acheter son rêve à deux roues au printemps 1975. Une Guzzi T3 Calif'. Il va me faire connaître l'ambiance des concentres que nous écumerons ensemble trois années durant. Une virée avec lui, au moins une anecdote. Comme ce rassemblement dans les monts du Beaujolais. On quitte la N6 du côté de Mâcon. On se retrouve avec trois quatre gars qui montent aussi. La nuit tombe, le brouillard se lève. La Calif était avec ses six (!!!) longue portée un light show roulant. 
"Bon, ben tu vas rouler devant. On te suit." Quelques bornes plus loin, tout le monde a fini dans une prairie, sans dommages aucun, et dans un fou rire général, lorsque la Guzz' a tiré droit dans un virage. Avec lui je vais côtoyer une foule de personnages haut en couleurs. Philippe "L'Alsacien" et sa 500 Kawa, roi du dortoir en abri bus, le seul type que j'ai jamais vu faire cuire des sardines à l'huile sur un Camping Gaz... Tant de jours, de routes partagés en avait fait une sorte de grand frère.
Et puis, il y eut ce coup de fil au lendemain du Bol 78. Bidasse, j'encaisse ces quelques mots. "Ton pote Patrick et sa copine ont été percutés par une bagnole du côté de Cuges. Ils sont morts tous les deux". 
Je n'y croirai vraiment qu’après m'être trouvé devant leur tombe à la perm' suivante. Patrick, toujours là dès que la route se déroule devant moi, ou à l'écoute des vieux albums de Renaud qu'il m'avait fait découvrir.
Il y en eu d'autres de ces moments.  
Alors que la moto était encore l'objet fantasmatique convoité à travers les pages du Moto Journal de Guido Bettiol, un samedi en fin de matinée, Christian, un gars de mon patelin s'était encastré avec son Quatre Pattes dans le bus qui nous ramenait du lycée. Y perdant la vie. Ce jour là, la cote de l'action "Moto", déjà pas très bonne dans l'esprit de ma mère, connut un krach retentissant. 
Puis ce fut Franck, jamais revenu d'un week end dans les gorges du Verdon. Nous fûmes six du Moto Club à porter son cercueil, étrange expérience où il est difficile de n'être pas submergé par l'émotion. Franck tout jeune père dont je retrouvais la petite fille dans ma classe quelques années plus tard. Un douloureux raccourci. Il y eut aussi Mario, longtemps après. Mario et sa passion de la culture amérindienne, son sens du partage et de la proximité. Le premier à être emporté par la maladie. Perdre des copains sur la route paraît alors moins injuste... Injuste loterie de la vie lorsque Alexandre, le fils de mes amis Salvatore et Fabienne, passionné de mécanique, de Ducati et de Guzzi, l'esprit aussi affûté que son père, fut arraché à 24 ans par ce maudit crabe à celle qui partageait sa vie, ses parents, ses amis...
Quarante ans, qui laissent quelques vilaines traces et heureusement une foultitude de moments fabuleux!

Ca continue, bientôt.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire