dimanche 28 novembre 2010

Le marché comme il va.

Histoire de ne pas passer pour un incorrigible passéiste, je me suis intéressé aux nouveautés du marché moto. Dévoilées aux salons de Cologne et Milan, je les ai étudiées en détail à travers le hors-série de Moto Revue consacré au sujet.
Remarques en passant:
-Ne dérogeant pas aux règles de l'époque, l'édito a un côté « école des fans » qui ne froisse personne.
-Encore et toujours des bourdes et incohérences qui ne sont pourtant pas difficiles à déceler dans ce qui tient majoritairement d'un alignement de fiches techniques ou d'extraits de dossiers de presse.
-Je passe aussi sur le côté « exclusif » de ces nouveautés qu'ont peut admirer chez tous les confrères de MR ou moult sites internet.
Je vais m'en tenir aux 62 nouveautés motos annoncées. Je ne dois pas avoir la même lecture de ce mot que les rédacteurs de ce hors série. Les modèles que je dirais inédits se comptent pour ainsi dire sur les doigts des deux mains. Le reste n'est qu'évolution, remodelage ou retour de motos connues. Pas vraiment de (r)évolution donc!
Le Crossrunner de Honda, énième avatar des hybrides routière/trail offre une plastique pour le moins étonnante: imaginez le buste (et la tête) d'Alain Bernard sur les jambes de Kate Moss... Pourquoi pas. Le design n'a pas fini de me surprendre. Plus inattendue, la CBR 250. Bonne idée de remettre sur la route un deux et demi sportif. Sauf qu'à mon avis, l'engin a le dosseret entre deux chaises. (au moins) C'est plutôt le genre moto de niche. Alors à faire, autant y aller à fond. Or l'allure donne dans le sportif polyvalent et 25 canassons quant un 250 Portal de 1978 en donnait 38, il y a loin de la coupe aux lèvres.
Triumph débarque dans le segment des trails de moyenne cylindrée avec le 800 Tiger XC et le Tiger (tout court) modèle disons plus routier. Pas de commentaires sur l'esthétique. Tous les modèles du genre sont bizzaroïdes. Pour être correct. Concernant le XC il se place par sa cylindrée et son prix face au F 800 GS de BMW. Et dans ce cas de figure, je préfère et de loin, un twin au triple anglais. En tout cas, sur le papier l'anglaise est à la hauteur de ses concurrentes. Si l'engin surfe sur les traces de la 675, on pourrait en voir quelques unes franchir les trottoirs de nos belles métropoles.
Ah Ducati... A Bologne, les vestiges du passé seront bientôt rasés. La Diavel dont il a été beaucoup question avant sa sortie officielle, vous savez, le buzzzzz, ne déçoit pas. Ducati investit en en reprenant tous les codes le créneau des « muscles bikes », autrement nommées motos de kékés... Et dans le genre, c'est la totale, du silicone partout et pour parachever l'œuvre, l'engin est affublé d'une foultitude de bazars électroniques que j'aime tant. Dans le style, rien n'arrive à la béquille du Night Road Special! Mais on peut s'attendre au pire. Les cousins italiens s'intéresseraient de près aux maxis scotères. Le calice jusqu'à la lie!
Suzuki en dehors d'une énième évolution des Gex en 600 et 750 présente la GSR 750. Avec comme cible revendiquée la Z 750 de Chezlèverts. J'ai beau chercher, à part la couleur, je n'arrive pas à déterminer laquelle est la plus moche. Quelle belle inspiration! Tiens on dirait du Didier Barbelivien. S'il concevait des motos.
BMW automobiles appuie sa communication sur la thème de la joie qu'est sensée personnifier la marque. Ils ont dû laisser filer quelques morceaux de cerveaux du côté de Berlin. Du coup, ça n'est pas vraiment la joie, justement. Si la K 1600 n'était qu'une machine qui ne corresponde pas à l'idée que j'ai d'une moto, il n'y aurait pas matière à m'émouvoir plus que ça. Par contre en lisant sa présentation, j'ai retourné le canard pour être bien certain de na pas tenir l'Automobile Magazine entre les mains.
Quelques mots sur la Horex qu'on ne verra sûrement pas demain sur nos routes. Un V6 à compresseur pas plus large qu'un trois pattes et qui a le bon goût de ressembler à une moto, ça ne me laisse pas indifférent. Quitte à voir des motos chères autant que ça m'inspire un peu.
Les trois Norton ont chacune de quoi m'aguicher. A part le prix bien sûr, hélas. Mais même la "basique" Sport me comblerait d'aise. Je rêve un peu. Il est probable qu'avec le côté confidentiel de la marque le marché de l'occasion sera un brin surévalué. Wait and see.
Aprilia nous offre sur un plateau une RS4V APRC SE échappée des mains de Max Biaggi avec bien sûr la panoplie de béquilles qui va bien et pour faire bonne mesure une "naked" du même Tuono. C'était laid en twin, c'est laid en V4.
Question tarifs, la crise a de ces effets... A l'heure où l'automobile se met au "low cost" en s'affranchissant des ouvriers locaux pour la main d'oeuvre, le nombre de bécanes à plus de 15 000 € est impressionnant. On sait que la crise n'a pas les mêmes effets pour tous. En moto comme ailleurs, les Sans Difficultés Financières sont choyés. Tout est dit.
Au fait, question nouveauté vous avez peut-être eu vent du Quadro 4D, un MP3 avec une roue supplémentaire... Je ne vous fais pas un dessin. Comble du comble, l'engin a été conçu par le studio Marabese, celui-là même qui nous avait offert la V 11. Le pire est toujours à venir!
Celles que j'achèterais neuves: la F 800 GS pour la polyvalence et la HP2 Sport, pour son absolutisme, oui, oui, deux Béhêmes; le Forty Eight Harley pour son inadaptation et la Dyna Wide Glide pour glisser au ras du bitume; la W 800 Kawa, ce n'est pas une surprise et une Versys pour la facilité; une KTM 990 Adventure, parce que l'Adventuuure, c'est l'Adventuuuuure; une Bellagio pour rappeler qu'un genre custom peut-être rigoureux; Les Norton, pour l'esprit et la gueule du moteur; un Ural Ranger pour avoir quatre roues comme un Quadro; un 1300 XJR Yam, pour le coffre; la type 7 Zero Engineering pour mes vertèbres. Et un raton laveur, peut-être bien aussi car j'aime bien les bébêtes. Au fait, je garde mon V11. Avec les bracelets.
Bonsoir chez vous.

lundi 8 novembre 2010

Panne des sens.

Tout commence par une séance de mécanique philosophique. Mécanique: il s'agissait de venir à bout d'un caprice de démarrage aussi récurent qu'aléatoire, voire imprévisible. Philosophique: l'opération consistait en l'ablation d'une ces "béquilles", vous allez le comprendre, le terme est adéquat, dont sont équipées les machines modernes. Bref, en moins de deux, les sécurités de béquille et d'embrayage passaient à la trappe. Et d'une, je peux à nouveau mettre en route sans souci, de deux hormis l'injection et la gestion électronique qui va avec ma bécane est un peu plus racinaire.
Des générations de motards ont réussi à partir en virée grâce à une zone bien précise du cortex cérébral les invitant, une fois le brêlon en position verticale, à remonter d'un mouvement négligé du pied cette fameuse béquille et vérifier qu'un rapport n'était pas engagé. (Nonobstant la présence d'une accorte passagère.) Il y eut bien de temps à autres quelques distraits pour omettre ce petit cérémonial. Rarement cela ne fit la une des journaux. Néanmoins, le dispositif évitant de démarrer béquille dépliée et vitesse engagée vit le jour et finit par se généraliser. Du coup, cette zone de l'encéphale du motard, faute de sollicitations se trouva en jachère. Point besoin de chercher loin l'inspiration. L'idée de ce billet m'est venue après avoir parcouru une quarantaine de mètres béquille dépliée suite à cette fameuse séance de bricolage. La rééducation, c'est long. Surtout vers la fin.
Et petit à petit, insidieusement, d'autres dispositifs, de plus en plus électroniques, sont venus suppléer notre instinct et nos sens. Dispositifs aux appellations aussi aphrodisiaques qu'une infusion de queues de cerises. Jetez donc un œil à l'Aprilia RSV4, cela vous donnera un aperçu.
La grande idée est de nous vendre des machine toujours plus sécurisantes, (le mal de l'époque) plus pratiques, (la bagnole c'est pratique) plus performantes, (c'est tout à fait dans l'air du temps) histoire semble-t-il de permettre à des bourricots de maîtriser un déluge de canassons. Anti-blocage, (moto de Sarko) anti-patinage, (moto de Brian Joubert) anti-dribble, (moto de Noah fils) gps, (moto des brebis égarées) mode pluie, (moto de Kermit) mode sec, (motos de saucissons) modes et travaux, (motos de ménagères) ride by wire... (motos de funambules) A l'instar de la bagnole, l'électronique prend le pouvoir dans la moto et laisse à un boîtier le soin de contrôler ce qui était alors dévolu aux yeux, aux mains, aux pieds. La sensation, l'émotion laissent place à la rationalisation. La conduite de ces avatars modernes s'apparentera bientôt à celle d'un lave vaisselle. A ce rythme, la totalité du cerveau motard sera rapidement en friche. Laissant ainsi de la disponibilité pour les pubs de TF1. Les béquilles électroniques auront eu raison de nos sens. Et là...
Enlevez ses béquilles à un paralytique. Il n'ira pas bien loin. Que seront nous lorsque les béquilles auront totalement pris le contrôle de nos machines? 
Bonsoir chez vous.