Rouler en bécane, c'est une affaire de pas grand chose. Une fois qu'on a trouvé guidon à ses bras, on est paré. Quand viennent se greffer quelques copains, s'ajoutent le partage, de bons gros moments de rigolade, mauvaise foi et une bonne dose de solidarité. De quoi rendre heureux tout motardus erectus normalement constitué. Au XXIème siècle, cela s'écrirait: What else?
Néanmoins, je me retrouvais, par hasard un soir d'hiver, à l'assemblée générale du tout jeunot Moto Club. Alors qu'on se contentait de balader, arsouiller en toute désorganisation, une poignée d’immigrés de l'intérieur, pour l'essentiel des Lorrains, proposaient de faire la même chose de manière structurée.
Venu en observateur je repartais avec une carte de membre dans le cuir.
Le courant était tout de suite passé avec deux des piliers, Laurent le président et Nounours le secrétaire. C'était une micro société représentative des motards de la fin des 70's et du début des 80's. Un melting pot (de détente) de gars et de filles déjà, animés par une passion de la moto qui s'affranchissait des marques ou de la cylindrée. Plutôt jeunes, ceux qui dépassaient la trentaine faisaient déjà figures de vieux, des étudiants pas vraiment en fonds et de jeunes actifs, comme on dit aujourd'hui, fraîchement promus dans le monde du travail. Un monde (beaucoup) plus près des prolos, comparé à celui des années 2000. Pour beaucoup la moto était synonyme de sacrifices.
La réunion hebdomadaire, prélude au week-end à venir, tenait pour certains de la chanson de geste. La "réécriture" des hauts faits de la route du dimanche précédent était nettement influencée par la proximité du Vieux Port et de la fameuse Sardine. En réalité, à fréquenter des spécimens bien éloignés du bassin Vauban, j'ai pu observer ce phénomène dans toutes les sociétés motardes.
Au gré de celles-ci et des sorties des liens se tissèrent et il n’était pas rare qu'on se retrouve le dimanche soir après une balade à partager un plat de spaghettis chez l'un ou l'autre. Des moments qui laissent des traces, comme celles des bottes maculées d'huile de Bernard, étudiant fauché, sur la moquette du F2 que je partageais avec ma future femme.
Le plus charismatique, belle gueule, coeur d'or était sans contestation possible Christian. A l'aise quel que soit l'interlocuteur, charmeur, il portait ouvertement sa philosophie de la vie sur son Cromwell. "No sex, no bike." Philosophie efficace. A chaque concentre, on voyait toujours au matin surgir de sa tente une nouvelle copine.
Raoul grand gaillard ébouriffé n'avait qu'une religion: le Flat. Mais attention, du Flat "fait maison". Son engin du genre évolutif était un assemblage hétéroclite de R 75/5, noire, et de cylindres de R 90. Si l'engin ne payait pas de mine, ce n'est rien de le dire, il avait tôt fait de river leur clou aux plaisantins vu son style de pilotage des plus incisifs. Ongles en deuils et brillant esprit, il poursuivait des études d'ingénieur chimiste, brillamment menées à leur terme. Ceci déteignait pas mal sur ses lubies mécaniques. Il ajoutait régulièrement de l'éther, dans un pourcentage scientifiquement calculé par ses soins, sensé doper l'engin.
Néanmoins, un de ses plus hauts fait d'armes se déroula à l'arrêt. Pause panorama dans les gorges de la Nesque. On se gare. Arrive Raoul qui pose le flat sur la centrale aux côté de deux autres bécanes à l'aspect bien plus flatteur. On regarde, on s'émerveille, oh, ah! Puis blang, clang, taclang!!! La Béhême venait de se casser la gueule, entraînant avec elle les deux autres brêles. Raoul venait d'inventer le Domino Day. Un scénario à la Bar2 dont je vous laisse imaginer l'effet... On frôla l'incident diplomatique, d'autant plus que certains avaient peine à réprimer leur fou rire! L'un d'entre nous fit même remarquer qu'une brêle supplémentaire aurait terminé au fond du trou!
Bref, je finis par me retrouver au terme d'une démocratique A.G. président de cette joyeuse troupe. Il faut parfois une bonne dose de constance pour mener un tel groupe. Particulièrement sur la route. Toujours le même à la bourre pour le départ, toujours le même qui aura à coup sûr une emmerde dans la journée.
Je roule en tête, arrive derrière une voiture, patiente un peu et là, le trou pour ouvrir en grand et passer. La manœuvre achevée, je jette un oeil en arrière. Personne! Il y avait pourtant de la place! Je ralentis. La caisse me dépasse. Rien. Arrêt. Demi tour, il a du se produire un truc... Je les retrouve arrêtés sur le bas côté, quelques uns entourant la Quatre Pattes de Gianni. Quand j'ai mis gaz, il était derrière moi et gaz aussi. Arrivé à la hauteur du conducteur, clac, plus rien. Le câble de gaz venait de casser! Retapissage de fond de slip pour les suivants qui eux aussi ouvraient en grand! Le dieu du tarmac était avec nous. Tout le monde évita tout le monde... Joie, solidarité et une motivation immense.
Et nous en eûmes besoin quand il fut décidé d'organiser notre première concentre. Nous avions déjà l'expérience de deux "rallyes" qui avaient démontré notre efficacité. Alors participer aux rassemblements c'était sympa. Organiser le notre, encore mieux. Des semaines de préparation, des réunions pour ficeler le projet, la logistique, les animations, des réunions avec les élus, tout fut OK le jour J. La foi du groupe et la bonne volonté de ceux qui se trouvèrent entraînés dans cette affaire, copains, copines, famille aboutit à la réussite de NOTRE concentre. A la fin de ce we de septembre 82, nous étions crevés et heureux.
Avec le MC je découvris
aussi le monde du trial. Notre but n'était pas juste d'être un MC Pirate au milieu des autres, même si nous en avions l'esprit. Nous voulions offrir la possibilité aux gars du coin désireux de tâter de la compète de prendre leur licence chez eux et de leur offrir un support. Bernard, futur secrétaire et vert only, avait
amené des potes amateurs de zones, exilés de la licence. Ils furent les premiers à porter nos couleurs. Ils se montrèrent assez convaincant
pour que je me risque dans la verdure et me retrouve rapidement au guidon d'un 125 TY
préparé par les soins d'Eric qui officiait à l'époque comme mécano au
sein du team Fantic Motor usine en enduro. Il avait quelques recettes
simples et bon marché pour rendre cette machine diablement efficace. Le
trial c'est vraiment super. Dans une matinée tu te vautres autant que
dans une vie de (vieux) motard sans te ruiner!
Hébergé par un centre social, nous nous impliquions dans la vie associative de la ville. Comme cette année où on se retrouva dans le cortège du carnaval. On avait déposé la caisse du side de Jacky, remplacée par une baignoire. Jacky accaparé par l'organisation, m'avait laissé les commandes de l'attelage. Rouler avec un side lesté d'une baignoire remplie d'eau (!) et du pote Bernard en tenue de plongeur ne s'oublie pas. Grand succès public et tout cas.
Le temps a passé, d'autres ont pris le relais. Même s'il a changé de nom, le MC existe toujours. Une affaire de près de 40 ans. Pourvu que ça dure.
vendredi 15 janvier 2016
lundi 11 janvier 2016
Il s'appelait David Bowie.
Voilà trois jours que j'écoute Black Star. C'est album sera marquant dans la carrière de Bowie, j'en suis certain. J'en viens à espérer un Black Star Tour, l'occasion de le voir encore une (dernière?) fois sur scène. Un peu avant 8.30 alors que je vais brancher France Info, un notification. On vient de ré-épingler une de ses photos de mes albums Pinterest. Il est 8.28 et j'entends Fabienne Sintès qui parle de lui. Sensation bizarre. Sans attendre plus, un oeil sur Twitter. Défilement, et puis Télérama, laconique. "David Bowie est mort". L'émotion est trop forte.
1973, calé contre le juke box de la Pergola, le centre de gravité de nos vies d'adolescents en face du bahut, je balance ma pièce pour une seule chanson, Drive in Saturday, extraite de l'album Aladdin Sane. Quand je pense à Bowie, c'est cette image qui me vient toujours, liée à cette période heureuse d'une vie sans véritables soucis.
Un copain m'a fait rencontrer Bowie trois ans plus tôt avec The man who sold the world. J'ai tout de suite été fasciné par la voix. Cette voix à nulle autre pareille, funambule qui lorsqu'elle arrive à la limite de la fêlure porte vers les sommets de l'émotion. Cette voix servie par une musique et des arrangements qui toutes ces années durant m’emmènera dans des explorations musicales protéiformes.
De Bowie, on l'aura compris, je retiendrais tout. Chaque album trouve sa raison d'être. c'est juste une adéquation entre un album et l'état d'esprit du moment.
Si je faisais des tas, albums d'un côté, single de l'autre, qu'y aurait-il sur le dessus?
Albums: The rise and fall of Ziggy Stardust and the spiders from Mars; Aladdin sane; Heroes; Let's dance; Black Star.
Singles: Moonage Daydream; Lady Stardust; Drive in Saturday; Ashes to ashes; Criminal World; Blue Jean; Zeroes; Black Tie White Noise; Hallo Space Boy; I'm afraid of Americans; Lazarus. Sans compter tous les autres...
Heroes n'y figure pas? Si et avec quelle force. Cette chanson est peut être celle qui emmène mon esprit au plus loin en concert. Le riff de guitar qui monte et s'allonge sans faiblir m'envoie surfer sur une énorme émotion musicale. Quant à son interprétation du "Port of Amsterdam" elle me secoue au delà de celle de Brel. J'y ajoute une reprise très déglinguée de Let's Spend the Night Together des Stones pour clore un inventaire absolument non exhaustif.
David Bowie a quitté ce monde le 10 janvier. Sa musique reste et m'accompagnera jusqu'au moment où je ne serai plus là pour l'écouter.
1973, calé contre le juke box de la Pergola, le centre de gravité de nos vies d'adolescents en face du bahut, je balance ma pièce pour une seule chanson, Drive in Saturday, extraite de l'album Aladdin Sane. Quand je pense à Bowie, c'est cette image qui me vient toujours, liée à cette période heureuse d'une vie sans véritables soucis.
Un copain m'a fait rencontrer Bowie trois ans plus tôt avec The man who sold the world. J'ai tout de suite été fasciné par la voix. Cette voix à nulle autre pareille, funambule qui lorsqu'elle arrive à la limite de la fêlure porte vers les sommets de l'émotion. Cette voix servie par une musique et des arrangements qui toutes ces années durant m’emmènera dans des explorations musicales protéiformes.
De Bowie, on l'aura compris, je retiendrais tout. Chaque album trouve sa raison d'être. c'est juste une adéquation entre un album et l'état d'esprit du moment.
Si je faisais des tas, albums d'un côté, single de l'autre, qu'y aurait-il sur le dessus?
Albums: The rise and fall of Ziggy Stardust and the spiders from Mars; Aladdin sane; Heroes; Let's dance; Black Star.
Singles: Moonage Daydream; Lady Stardust; Drive in Saturday; Ashes to ashes; Criminal World; Blue Jean; Zeroes; Black Tie White Noise; Hallo Space Boy; I'm afraid of Americans; Lazarus. Sans compter tous les autres...
Heroes n'y figure pas? Si et avec quelle force. Cette chanson est peut être celle qui emmène mon esprit au plus loin en concert. Le riff de guitar qui monte et s'allonge sans faiblir m'envoie surfer sur une énorme émotion musicale. Quant à son interprétation du "Port of Amsterdam" elle me secoue au delà de celle de Brel. J'y ajoute une reprise très déglinguée de Let's Spend the Night Together des Stones pour clore un inventaire absolument non exhaustif.
David Bowie a quitté ce monde le 10 janvier. Sa musique reste et m'accompagnera jusqu'au moment où je ne serai plus là pour l'écouter.
Inscription à :
Articles (Atom)